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Le Plaisir de glisser sur une onde. Vitesse, équilibre et sensations … Sensations de quoi? De liberté?

De ce que vous voulez de bon, en tout cas. 

Comme une bonne session de surf entre amis. Pas une foule, hein ! Juste quelques amis. Ça vous parle ?

A contrario, je reviens d’un endroit où la pression au peak est tellement importante que la pratique du surf en devient ardue. À en perdre l'esprit du surf ?


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Classe mondiale

Vous devinez bien que plus une vague est belle et réputée, plus elle est convoitée. Et plus le niveau est élevé. C’est le cas avec cette vague qualifiée de classe mondiale.

Autre chose: malgré son statut de World Class Wave, elle reste accessible techniquement. Son take-off n’est pas des plus compliqués. Ce qui augmente d’autant sa fréquentation. 


Devant un sport surchargé, les réflexes « guerriers » reviennent. Souviens-toi d’avoir l’esprit de compétition. Car aller à l’eau revient souvent à entrer dans l’Agon cher aux Grecs anciens. Une sorte de concours sportif au sein d’une arène liquide.


Soupirer avant d’aller batailler encore et encore. Penser à des stratégies de conquête. User consciemment ou non de communication non verbale. Affronter le regard fermé des autres, et afficher ou non un sourire franc au risque de se faire marcher sur les pieds. 


Les grandes manoeuvres

Une vague de cette splendeur oblige à penser fort. Mais en fonction de la foule avant tout. À manœuvrer. 


Une de ces manœuvres peut tout simplement être l’évitement : surfer en horaire décalé. Se reporter sur d’autres spots semblables. Viser les jours moins bons, etc


Ces facteurs de gestion de foule que personne n’aime devoir prendre en compte, amènent à se sentir expatrié du plaisir simple de la glisse. En porte-à-faux avec ses aspirations naïves et primitives. Ce qui est un comble lorsqu’il s’agit d’un sport de nature comme le surfing. 


Exil en contrepoint

Et arrive cette chose: Avec le temps naît vis-à-vis de ces postures agonistiques un sentiment de lassitude. Est-ce la foule ou les stratégies à mettre en place qui pèsent?


Jusqu’à quel point peut-on supporter "la foule" ?


En parallèle de l’autre côté du globe, des amis se sont exilés dans un endroit reculé du monde, loin de cette pression de la masse. Là-bas il ne suffit que de penser …. À surfer.



Une arène liquide

Quel scène épique se joue sur un spot de classe internationale assez accessible pour des niveaux de surf intermédiaires ? Quel ébahissement incrédule ? Voyez donc. Par dizaines, par centaines, des surfeuses et surfeurs choisissent librement de converger vers cette vague alléchante de perfection, prometteuse de sensations inédites dans leur recherche de glisse. Comment interagissent-ils ? Partagent-ils équitablement les vagues, ou entrent-ils en compétition en usant des interactions communément répandues, liées au niveau de surf, à la convoitise, la gourmandise voire la voracité ?


Il faut arrêter de se voiler la face. Rares sont les spots où le partage équitable des vagues se met en place. Combien de fois un spot « pourri » de monde voit se profiler, malgré tout, un surf partagé ? Une compréhension mutuelle ? Un respect inconditionnel qui n’inclut pas de règles de localité, de niveau de surf, d’engagement ? C’est rarissime. Car le surf inclut une notion de combat pour attraper la vague. Placement, stratégie, acuité de rame et sens marin, intimidation et courage.


Une hiérarchie informelle se met en place, universelle. Avant tout le local s'arroge la priorité, du meilleur au moins bon. Puis les autres surfeurs, du meilleur au moins bon. Reste une chance de choper une vague pour les glisseurs satellites si une grosse série décale


Sur une vague avec une zone de take-off réduite, la concentration trop importante de surfeurs fait exploser la notion de « chacun à son tour » comme discuté dans le point 5.1 des 5+1 règles (non) écrites du surf téléchargeable pour peau de zob sur la page d'accueil, si vous ne l'avez déjà fait. Au delà d’une masse critique de pingouins, plus de discipline. 




Masse critique

Ce qui peut s’appeler « l’effet de masse » défroque les surfeurs de leur sens de la liberté et leur autonomie. Sans plus d’esprit critique ni de recul, les (nous) voilà à suivre le comportement dominant de la foule. Ils s’entassent avec les autres surfeurs au peak, à l’image des restaurants bondés où la file d’attente pour y grailler s’allonge sur le trottoir. 


Ceci contre toute raison, contre tout calcul basique, à savoir qu’ils ne pourront mathématiquement pas prendre une seule vague, vu le nombre de prétendants. Sauf à feinter, court-circuiter, doubler, s’imposer, faire place nette, intimider, revendiquer (de droit) son appartenance locale devant l’afflux constant de visiteurs, voire faire le méchant à la manière des célèbres Black shorts hawaiiens. En fonction des cartes que l’on a en main, ça laisse toujours plus de chance qu’au loto, certes.


Que pensent les surfeurs chacun dans leur tête, coude à coude au peak ? Sont-ils résignés en allant tout de même à l’eau, et en espérant en choper une par accident? S’en tiennent-ils à adopter l’instinct guerrier, l’esprit d’en découdre ? Comment se profile dans leur esprit la volonté de s’imposer à coup d’intimidation, de manifestation d’agressivité, de poker face-visage fermé etc ? Pensent-ils encore ? 




Avoir la (mauvaise) foi

On devine néanmoins que des sentiments contrariés traversent l’esprit de chacun selon son point de vue : l’envie de consommer le surf coûte que coûte (prix du trip oblige), l’impatience, le désir de s’imposer et le goût d’en imposer, la lassitude de voir le monde entier débarquer sur son spot. Aussi la session se déroule souvent sous forme de conflit larvé avec les autres surfeurs, et c’est un peu l’enfer de Sartre.


Car il faut ajouter la mauvaise foi que tout surfeur trimballe avec lui au peak. Pourquoi ne pas se placer un peu à l’intérieur, mine de rien? Pourquoi ne pas profiter de la faiblesse apparente de l’autre surfeur. (Ab)user de son propre avantage technique, de sa connaissances du spot, de sa vélocité? De son sentiment de légitimité ?


La zone de take-off est une zone de combat pour la vague, une arène confinée. Et c’est d’ailleurs le sel des compétitions : voir les surfeurs batailler pour choper la prio, remonter plus vite au peak. 


C’est toujours intrigant de voir comment nous, surfeurs, par essence épris de liberté, coexistons dans ces espaces confinés et partagés par contrainte et/ou attirance conjointe de la perfection.




André et la vague absurde

Car nous touchons à l’absurde de la condition de surfeur. Cet absurde à rapprocher de celle de la Condition humaine dont cause Malraux. L’entassement va à l’encontre du désir de liberté et d’espace que l’on recherche en surfant. L’esprit de solidarité face à l’adversité disparaît. Et laisse la place à un comportement "guerrier", en reprenant une thématique chère à Dédé. Simplement l’adversité vient ici de la présence démultipliée de l’autre surfeur, d'un autre soi.


Alors on peut se demander si notre plaisir de surf ne se dilue pas dans ces foules attirées par les étoiles des reports. Que devenons-nous en tant qu’individu ? Sommes-nous encore fiers d’appartenir à cette communauté de surfeurs ? Ou la maudissons-nous? Cette communauté surf, entassée là comme des veaux à batailler, partir à trois sur une même vagues, se faire l’intérieur en permanence…



Se souvenir de pourquoi on aime le surf

Le surf est un sport ultra photogénique, et Instagram est là pour nous le rappeler, quand ce ne sont pas les magazines papiers, parmi les plus esthétiques de la presse à mon goût.


Voici peut-être une des causes de son succès grandissant. (Pour enrayer la machine, faudrait-il qu'un Bolloré haïsse le surfing comme représentation dégénérée et commande de relayer sa haine dans ses multiples titres de presse ? Et ainsi déguelasser l’image surf ?)


On peut aussi causer de la facilité déconcertante avec laquelle tout le monde peut dégotter des infos sur les spots et la météo surf. Et continuer de lister ainsi : les écoles de surf à tous les coins de rue, les limites toujours repoussées de la pratique grâce au progrès technique, la démocratisation de l’accessibilité matérielle. Car oui, le surf reste un sport simple, une planche et une combi dans la plupart des cas. Plus onereux qu’une paire de running, mais moins gourmand qu’un canasson.




In-extension du domaine de la glisse

À bien y regarder, malgré son image affirmée et marketée de wannabe rebelle et hors système, la pratique sportive et récréative du surfingue s’inscrit dans la droite ligne des Autoroutes touristiques. Réservé aux élites curieuses et dandy à ses débuts, la massification de sa pratique s’est accentuée avec l’orientation de la société vers les loisirs, la consommation. Et ce n’est pas un scoop. 


Mais voilà. Contrairement au tennis, au foot ou à la pétanque, le surf souffre que son domaine de pratique n’est pas extensible. La concentration de pratiquants sur les spots existants et les plus en vue est donc inéluctable. Sauf à construire toujours plus de piscines à vagues. Ce qui est un autre débat. 


Sauver le surf dans nos têtes ? Oui c’est faisable, Aimable. Se souvenir d’apprécier le moment. Parvenir à rester sensible à la beauté des lieux. Et même à tous les lieux communs du surf, tant qu’à charger la barque. 




Pensez-vous que le surf est une mode qui passera avec le temps ?

La solution serait-elle de mettre les bouts toujours plus loin ? Explorer les chemins de traverse du surf, loin des autoroutes du tourisme surf. Se placer en lisière, temporelle et géographique. En cela, la géographie et le surf ont toujours été intimement liés.


Ou paradoxalement se glisser dans cette arène formalisée, la compétition en surf. Et avoir le spot à soi seul pendant les séries. Prenez vos licences !


A l'instar de mes chers amis partis loin des autoroutes de la glisse, il est toujours possible d’emprunter les chemins de traverse. Ça demande du temps et de l’intelligence. Ou (avec encore plus d'intelligence!) savoir partir en bateau, à l’instar des fabuleuses histoires de boat trips narrées dans le Surfer's Journal  N° 160 avec des vagues inaccessibles, magnifiques et absolument vierges de nos comparses détestés/adorés.



Mais une chose est sûre, même si cette aspiration planétaire à la glisse s'avérait une mode qui passe un jour, jamais personne ne pourra se plaindre du (trop de) monde qui surfe. Car comment refuser aux autres le plaisir infini qu’on éprouve soi-même à glisser sur une onde, Raymonde? 


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